Partage de la valeur : accord national interprofessionnel du 10 février 2023

Actualité WAAGE PRO, Publiée le 06 mars 2023

Analyses du cabinet people base cbm

Partage de la valeur : ENCOURAGER LE RECOURS AUX DISPOSITIFS DE PARTAGE DE LA VALEUR POUR FACILITER LEUR GENERALISATION

 

Encourager et faciliter un développement de la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés par la négociation collective.

Pour faciliter la mise en place de la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés, les organisations signataires demandent une modification du cadre légal :

  • Les organisations d’employeurs et de salariés dans chaque branche professionnelle ouvrent, avant le 30 juin 2024, une négociation visant à mettre à disposition des entreprises de moins de 50 salariés un dispositif de participation facultatif, dont la formule peut déroger à la formule de référence de la participation, dite « formule légale », et donner un résultat supérieur comme inférieur à celui de la formule de référence de la participation;
  • Les entreprises de moins de 50 salariés ont la possibilité de mettre en place :
    • Le dispositif de branche par accord collectif ou par décision unilatérale, ou,
    • Par accord collectif, une autre formule dérogatoire de participation pouvant donner un résultat supérieur comme inférieur à celui de la formule de référence de la participation, dite « formule légale ».

 

Faciliter la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises d’au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés.

Les entreprises de 11 salariés ou plus, et de moins de 50 salariés mettent en place au moins un dispositif légal de partage de la valeur (participation, intéressement, prime de partage de la valeur, abondement à un PEE, PEI ou PER) dès lors qu’elles remplissent les conditions suivantes :

  • Être constituées sous forme de société,
  • Réaliser un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1% du chiffre d’affaires pendant 3 années consécutives,
  • Ne pas être couvertes par un dispositif de partage de la valeur (participation, intéressement, abondement à un PEE, PEI ou PER) au moment où la condition précisée à l’alinéa précédent est remplie.

Cette obligation entrera en vigueur au 1er janvier 2025. Pour l’appréciation du respect de la condition relative à la réalisation du bénéfice net fiscal au moins égal à 1% du chiffre d’affaires pendant 3 années consécutives, seront prises en compte les années antérieures à cette date d’entrée en vigueur, soit les années 2022, 2023 et 2024.

Les sommes versées dans ce cadre ouvrent droit au régime social et fiscal de la participation.

 

Mieux prendre en compte les résultats exceptionnels

Dans les entreprises de 50 salariés et plus pourvues d’au moins un délégué syndical et soumises à l’obligation de mettre en place la participation, les négociations engagées avec cette délégation syndicale conformément aux dispositions du code du travail relatives à la participation et/ou à l’intéressement portent également sur l’insertion d’une clause spécifique dont l’objet est de fixer les modalités de prise en compte des résultats, au sens des dispositions relatives à la participation, réalisés en France et présentant un caractère exceptionnel tel que défini par l’employeur. Ces modalités peuvent prendre deux formes :

  • Soit le versement automatique d’un supplément de participation ou d’intéressement dont les modalités (formule de calcul, temporalité, bénéficiaires, etc.) sont définies par accord ;
  • Soit le renvoi à une nouvelle discussion sur le versement d’un dispositif de partage de la valeur (participation, intéressement, PPV, abondement au PEE ou au PER, etc.).

L’obligation visée au premier alinéa est réputée satisfaite dès lors que l’entreprise a mis en place un dispositif de participation prévoyant une formule dérogatoire conduisant à un résultat plus favorable que celui de la formule légale et/ou un accord de participation ou d’intéressement intégrant déjà une clause spécifique de prise en compte des résultats exceptionnels.

Dans les entreprises visées au premier alinéa et déjà couvertes par un accord de participation et/ou d’intéressement au moment de l’entrée en vigueur du présent accord, une négociation s’ouvre avant le 30 juin 2024 pour se conformer aux dispositions du présent article.

 

Inscrire la PPV dans le champ du partage de la valeur et de l’épargne salariale

La PPV ne doit pas se développer au détriment des dispositifs d’intéressement et de participation, et ce dans le respect du principe de non-substitution avec le salaire.

Les organisations signataires demandent les évolutions suivantes s’agissant du cadre légal et réglementaire :

  • Ouvrir la possibilité de placer la PPV dans un plan d’épargne entreprise et/ou d’épargne retraite lorsqu’il(s) existe(nt). La PPV a en effet vocation à être intégrée à l’épargne salariale. Son régime social et fiscal sera ainsi parfaitement identique à celui de l’intéressement à partir de 2024. Cette mesure permettra aux salariés qui le souhaitent de verser tout ou partie de la prime de partage de la valeur dans un dispositif d’épargne salariale ou d’épargne retraite dans les mêmes conditions que pour le versement d’une prime d’intéressement. Les entreprises ont la possibilité d’abonder le cas échéant selon les modalités en vigueur pour l’intéressement.
  • Permettre l’octroi d’au plus deux PPV chaque année dans la limite du plafond et du nombre de versements actuellement prévus.
  • A compter du 1er janvier 2024, maintenir le régime fiscal et social en vigueur au 1er janvier 2023 pour les entreprises de moins de 50 salariés. Pour les entreprises de plus de 50 salariés, le cadre prévu par la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est maintenu.

 

Simplifier le forfait social

Le niveau et la coexistence de plusieurs taux de forfait social résultant de l’empilement des législations relative à l’épargne salariale sont aujourd’hui des freins à l’attractivité et à la lisibilité de ces dispositifs. Ce système est complexe à appréhender et il suscite des situations incohérentes.

La simplification du forfait social serait de nature à inciter la mise en place d’accords d’intéressement ou de participation et à encourager le versement de suppléments de participation et d’intéressement plus conséquents en faveur de l’épargne et du pouvoir d’achat des salariés.

 

Faciliter le choix de critères RSE dans les accords d’intéressement

De plus en plus d’entreprises souhaitent intégrer des critères de RSE dans leurs accords d’intéressement pour utiliser l’intéressement comme un levier de performance sociale et environnementale. Les organisations signataires souhaitent encourager plus fortement cette pratique qui nécessite un cadre juridique clair et sécurisé.

Sans remettre en cause l’exigence du caractère aléatoire des critères RSE, il apparait nécessaire de compléter l’article L. 3314-2 du code du travail pour y préciser que la formule de calcul de l’intéressement peut intégrer un ou plusieurs objectifs sociaux ou environnementaux tout en imposant aux organismes de contrôle de publier chaque année un guide de leurs modalités de contrôle des accords d’intéressement comportant notamment les éléments permettant d’apprécier le caractère aléatoire des critères de RSE.

 

Faire connaitre les procédures simplifiées de dépôt et de contrôle des accords d’intéressement et poursuivre cette simplification

Les accords d’intéressement déposés par les entreprises à partir du 1er janvier 2023 ne sont plus soumis au contrôle de forme de la Direction départementale en charge de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS ou DDETS-PP, ex-Direccte). Ils sont néanmoins soumis à un contrôle de fond des organismes de recouvrement. La DDETS doit donc transmettre les accords d’intéressement à ces organismes dès réception. L’organisme de recouvrement dispose d’un délai de 3 mois maximum pour demander la modification des dispositions de l’accord qui sont contraires à la loi. Si l’organisme de recouvrement ne demande aucune modification pendant le délai de 3 mois, l’entreprise peut bénéficier des avantages sociaux et fiscaux de l’accord pour l’exercice comptable en cours. Si l’organisme de recouvrement ne demande aucune modification de l’accord pendant un délai de 5 mois, l’entreprise peut conserver les avantages pour les exercices comptables postérieurs. Si l’organisme de recouvrement demande la modification de certaines clauses dans le délai de 3 mois, l’entreprise doit effectuer les modifications avant de pouvoir bénéficier des avantages de l’accord.

Depuis la loi portant mesure d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022, lorsque l’accord a été rédigé selon une procédure dématérialisée permettant de vérifier préalablement sa conformité aux dispositions légales en vigueur sur https://www.mon-interessement.urssaf.fr/, les exonérations prévues sont réputées acquises pour la durée de l’accord à compter de son dépôt.

Cette procédure offre un cadre simplifié et sécurisant aux entreprises. Il convient de les en informer davantage, notamment à l’occasion de la semaine de l’épargne salariale.

Au-delà, il convient de poursuivre les travaux de simplification des contraintes administratives et de formalisme pesant sur la mise en place et la gestion des dispositifs. Cela passe notamment par la limitation des pièces exigées par l’administration à celles strictement justifiées au regard des dispositions légales.

 

FACILITER LE DEVELOPPEMENT ET LA SECURISATION DE L’ACTIONNARIAT SALARIE DANS LES ENTREPRISES DONT LA FORME JURIDIQUE LE PERMET

 

Mise en place des « Plan de partage de la valorisation de l’entreprise »

Les dirigeants d’entreprises, en particulier les PME et ETI non cotées, qui souhaitent mettre en place l’actionnariat salarié sont souvent freinés par la complexité de l’opération et par l’ouverture du capital qui implique notamment l’ouverture de la gouvernance. Or le dirigeant, par exemple patrimonial, peut souhaiter offrir à ces salariés une prime qui reflète néanmoins la valorisation de l’entreprise.

Les organisations syndicales et patronales demandent donc la mise en place d’un nouveau dispositif de partage de la valeur pour permettre aux entreprises de toute taille (ou les groupes) qui le souhaitent de mettre en place par accord collectif un plan dit « Plan de partage de la valorisation de l’entreprise ».

Ce plan doit bénéficier à l’ensemble des salariés ayant au moins un an d’ancienneté qui se voient attribuer un montant indicatif. A l’issue d’une durée de trois ans, le salarié perçoit le montant correspondant au pourcentage de valorisation de l’entreprise appliqué à ce montant indicatif. Cette somme peut être versée en plusieurs fois. Le dispositif permet ainsi au salarié d’être très directement intéressé à la valorisation de l’entreprise et pas seulement à ses résultats. Dans le cas d’entreprises non cotées, la valorisation de l’entreprise peut se faire notamment en fonction d’indicateur de référence (multiples d’EBITDA par exemple) négociés à la mise en place du plan.

Le dispositif bénéficie des mêmes avantages sociaux, fiscaux. Les sommes versées peuvent être placées sur un dispositif d’épargne salariale comme les autres dispositifs de partage de la valeur. Il est déductible fiscalement pour l’entreprise.

Les sommes versées au titre de ce nouveau dispositif ne peuvent se substituer au salaire et aux sommes versées au titre des autres dispositifs de partage de la valeur.

 

Améliorer l’information aux actionnaires salariés

Les organisations syndicales et patronales partagent la même volonté de favoriser la montée en compétence des actionnaires salariés pour leur permettre de mieux apprécier les enjeux de l’entreprise et de l’actionnariat. A cet égard, les entreprises qui le souhaitent ont la capacité d’organiser des formations ad hoc, intégrées au plan de développement des compétences.

L’actionnariat salarié nécessite en effet une compréhension à la fois des mécanismes d’attribution et de gestion des actions mais aussi une bonne information et sensibilisation du salarié quant aux risques inhérents à l’actionnariat.

C’est pourquoi les organisations signataires souhaitent faciliter l’accès des salariés à l’information existante sur leur exposition au risque sans créer de nouvelle obligation de conseil.

Les signataires invitent en outre le Gouvernement à conduire les actions nécessaires, notamment au niveau européen, afin de simplifier et de clarifier cette information, s’agissant par exemple des « fonds relais ».

 

Faciliter la mise en place de dispositif apportant davantage de garanties du capital ou d’attractivité aux salariés et faire mieux connaitre ce type de mécanisme.

Les organisations signataires souhaitent faciliter la mise en place de dispositifs permettant une moindre exposition aux risques de perte en capital pour les salariés d’entreprises mettant en place un plan d’actionnariat salarié.

Un risque inhérent à l’actionnariat salarié est notamment la perte cumulée de l’emploi et du capital investi en cas de faillite de l’entreprise.

Pour réduire le risque de perte de la valeur des actions, il est possible de mieux garantir le capital investi par le salarié.

Les organisations signataires s’engagent à sensibiliser leurs adhérents sur les possibilités permettant de limiter l’exposition au risque de perte en capital.

Par ailleurs, elles proposent une évolution juridique qui renforce l’attractivité des FCPE d’actionnariat salarié dotés d’un effet de levier. En cas de valorisation de leur entreprise, les salariés bénéficient grâce à ce mécanisme d’une majoration de leur plus-value. Leurs gains augmentent plus rapidement que ceux des détenteurs d’actions sans l’avantage de ce mécanisme. Dans le cas contraire d’une perte de valeur de l’entreprise, la moins-value de leurs actions est identique à celle de n’importe quel porteur.

Une contrainte qui peut limiter l’intérêt de ce mécanisme pour l’entreprise ou pour le salarié est l’obligation de verser les sommes dues à l’échéance du fonds en numéraires. Cette sortie du FCPE en numéraire conduit à une cession des actions et réduit ainsi l’actionnariat salarié.

 

Ouvrir une plus grande portion du capital aux salariés

Les organisations signataires considèrent qu’il est important de favoriser le développement de l’actionnariat salarié.

A ce titre, elles proposent d’augmenter le plafond global d’attribution d’AGA (actions gratuites) lorsque le plan d’AGA est offert à tous les salariés : ce plafond serait ainsi désormais fixé à 40% du total du capital de l’entreprise au lieu des 30% actuellement en vigueur. Elles proposent également de relever le plafond global dans le dispositif classique (+5% soit 15% pour les ETI et 20% pour les PME). Il convient aussi de prévoir que le seuil du dispositif classique peut être augmenté jusqu’à 30 % en contrepartie d’une condition à 25% de la masse salariale.

Parallèlement, il est nécessaire d’autoriser le rechargement du plafond individuel de 10% pour permettre à des salariés et dirigeants qui ont fait le choix d’être des investisseurs de long terme de leur société d’être à nouveau éligible à un plan d’actions gratuites. En l’état actuel, la fidélité et la prise de risque en faveur de l’entreprise conduisent mécaniquement à l’atteinte du plafond alors même que l’entreprise se valorise. Les nouveaux investisseurs sont de ce fait privilégiés face aux salariés investisseurs de long terme.

 

Favoriser les reprises d’entreprises par les salariés

L’article L. 3332-16 du Code du Travail dispose qu’un plan d’épargne d’entreprise établi par accord collectif peut prévoir l’affectation des sommes versées à un fonds dédié au rachat des titres de cette entreprise ou d’actions émises par des sociétés créées, ainsi que de titres d’une entreprise du même groupe, dans le cadre d’une opération de rachat réservée aux salariés. La notion d’« opération de rachat » n’étant pas définie, elle peut laisser penser qu’elle ne s’applique qu’à une “reprise” par les salariés en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ce qui n’est pas le cas. Les organisations signataires demandent à l’administration de préciser le mode de fonctionnement du FCPE dit de « reprise ».

 

Partage de la valeur : AMÉLIORER LES DISPOSITIFS D’ÉPARGNE SALARIALE

 

Mise en place d’un nouvel abondement au PEE déplafonné.

Actuellement, l’employeur peut effectuer un abondement unilatéral au PEE destiné à l’acquisition d’actions de l’entreprise, plafonné à 2 % du PASS, soit environ 900 € par an.

Il conviendrait de permettre à l’employeur d’effectuer chaque année un abondement unilatéral déplafonné à hauteur de la PPV. En symétrie, il est nécessaire de prévoir la même possibilité pour l’abondement des PER.

Promouvoir une épargne verte, solidaire et responsable en incitant à l’orientation des fonds de l’épargne salariale vers des supports d’investissements à visée sociale, en faveur de la transition écologique ou de l’économie productive.

Les organisations signataires rappellent que l’essor de l’investissement socialement responsable en France est étroitement lié au développement de l’épargne salariale, sous l’impulsion entre autres, du label CIES (comité intersyndical d’épargne salariale), créé il y a plus de 20 ans. L’investissement socialement responsables représente aujourd’hui 40% des encours de l’épargne salariale, hors actionnariat salarié.

Les signataires demandent que les gestionnaires de fonds proposent dans les PEE et les PER en comptes titres au moins 2 fonds qui prennent en compte de critères extra-financiers (exemples : fonds labélisés ISR, GREENFIN, FINANSOL, CIES, France Relance). Ces fonds pourront être nourriciers de fonds appartenant eux-mêmes à ces catégories.

 

Créer trois nouveaux cas de déblocage anticipé des PEE pour adapter l’épargne salariale aux nouveaux défis.

Afin d’adapter l’épargne salariale aux nouveaux défis, les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics d’ouvrir trois nouveaux cas de déblocage anticipé :

  • Pour les dépenses liées à la rénovation énergétique des résidences occupées à titre principale et d’autre part,
  • Pour faire face aux dépenses engagées en tant que proche aidant sous réserve de fournir les justificatifs (à titre d’illustrations, ces pièces pourraient être : copie du livret de famille pour démontrer le lien parental, ouverture d’une tutelle du proche, reconnaissance de l’invalidité du proche, prise en charge d’un dépendant dans l’avis d’imposition du proche, présentation d’une facture de l’organisme prenant en charge le proche, présentation d’une facture lorsque que l’on recours à un tiers, exemple service à la personne, etc.). Ces situations peuvent en effet engendrer des dépenses très significatives de la part des salariés qui légitiment le recours à l’épargne ;
  • Pour l’acquisition d’un véhicule dit « propre » (neuf ou d’occasion).